Cinéville se développe dans le Maine-et-Loire

© Lilou Hamon

Le circuit ouvre son nouvel établissement ce vendredi 21 novembre à Beaupréau-en-Mauges, dans un contexte de crise de la fréquentation qui n’empêche toutefois pas l’optimisme de son dirigeant, Yves Sutter.

Depuis un peu plus d’un an, Cinéville multiplie ses investissements, entre acquisitions de cinémas d’est en ouest – à Dorlisheim, Dijon ou Saint-Brieuc – et premiumisation – développement du concept maison Orium. C’est désormais au tour de la construction, avec l’ouverture de son tout nouveau site angevin de 5 salles et 686 fauteuils, son deuxième dans le département après le Cinéville Les Ponts-de-Cé. « Historiquement, Cinéville est davantage implanté dans des agglomérations plus peuplées, relate Yves Sutter, directeur général du réseau. Mais en 2015, en association avec Rémy Sérillon, nous avons ouvert un site à Savenay, une commune de 8 000 habitants, et les entrées ont rapidement dépassé nos attentes. » En effet, la modernisation du parc durant les années 2010, qui accompagne un marché dynamique, se caractérise notamment par « l’arrivée et le succès de cinémas de 4, 5 ou 6 salles dans des territoires plus petits ». Et au moment où Yves Sutter remarque un fort potentiel dans les Mauges, une réorganisation administrative importante s’y déroule : « Les six intercommunalités de la région, chacune composée d’une douzaine de communes, ont fusionné. Ainsi, Beaupréau-en-Mauges – anciennement Beaupréau – passe de 8 000 à 24 000 habitants, et devient le cœur de la nouvelle intercommunalité réunissant les 120 000 personnes des six villes créées. »

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S’adapter aux réalités du marché

C’est donc de « la convergence de plusieurs raisonnements et observations » que naît l’idée d’implanter un complexe dans une région conséquente, dotée de seulement 5 cinémas, dont un mono-écran à Beaupréau-en-Mauges, le Jeanne d’Arc. L’indice de fréquentation y est de 0,7, soit fortement plus bas que la moyenne départementale de 2,7. Le projet est accepté en CDACi en juillet 2019, puis en CNACi en décembre 2019, mais arrêté par la pandémie. Et au sortir du Covid, plutôt que d’entamer des constructions, Cinéville préfère « prendre le temps d’observer les conséquences de la crise ». La chute de la fréquentation mais surtout l’inflation des coûts des travaux poussent le groupe, accompagné du cabinet d’architecture Gilles Imbert, à revoir ses ambitions à la baisse, en réduisant la taille du site de 10 % ainsi que sa capacité de 5 %. Après une validation par la Cour administrative d’appel de Nantes début 2022 suite à un dernier recours, les travaux commencent début 2025. 

Le projet définitif est un établissement de 2 240 m² pour 5 salles allant de 77 à 236 places, soit un total de 686 fauteuils dont 21 PMR. Côté technique, deux projecteurs Laser 4K sont installés et toutes les salles sont équipées en 7.1 à l’exception de la plus grande, en Dolby Atmos. Au total, près de 5,5 millions d’euros ont été dépensés.

La cohabitation avec le cinéma Jeanne d’Arc est gérée par une convention tripartite signée lors de la CDACi entre l’association gérant le mono-écran, Cinéville et la Ville de Beaupréau-en-Mauges. Ainsi, le Jeanne d’Arc garde les dispositifs scolaires et l’exclusivité sur les sorties art et essai de moins de 175 copies, tandis que le Cinéville adopte une ligne généraliste. Certains programmes du réseau y seront repris, tels que “Ciné-Bambino” et “Je découvre le cinéma”, tous deux à destination du jeune public, ou encore les reprises de “Cultissime !” et “Cult’Anim”. « Nous nous situons dans une zone pavillonnaire dense en familles, et la démographie – à l’époque où nous avons réalisé notre étude – était très dynamique, explique Yves Sutter. Nous pensons donc que l’établissement, par son envergure et sa programmation, peut attirer des spectateurs à 20 minutes aux alentours. » Le directeur général de Cinéville, en se basant sur les chiffres du CNC, pense en effet que « les complexes formatés sur des zones d’influence cinématographique à 30 minutes ne correspondent plus à la réalité, ce qui peut aussi expliquer leur perte de fréquentation ». L’étude menée avec le cabinet Ciné Conseil table sur 140 000 entrées annuelles, bien que le marché actuel perturbe les prévisions. « En 2023 et 2024, ces types de cinémas de la moyenne exploitation se rapprochaient de leurs entrées pré-Covid, donc même sans attendre un Un p’tit truc en plus annuel, il y avait des raisons de garder nos prévisions de 2019 – qui pour rappel se fondaient sur les résultats de 2018, donc 201 millions d’entrées. Maintenant, la question est de savoir si la vérité des prochaines années est celle de 2024 ou de 2025. »

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Continuer à investir

L’état de la fréquentation cette année impacte en effet tout le parc Cinéville, qui avait « surperformé en 2024 grâce aux succès français », et se retrouve maintenant en manque de spectateurs occasionnels. Et alors que le circuit a lancé il y a un an son concept premium maison Orium*, déployé dans quatre de ses établissements – à Saint-Sébastien-sur-Loire, Dorlisheim, Vern-sur-Seiche et Saint-Nazaire –, il peut difficilement en juger les performances tant l’offre a manqué. « Mais la question est aussi de savoir si la salle engrange des entrées qui n’auraient pas été réalisées si elle n’existait pas, et je ne le pense pas, affirme Yves Sutter. Il peut en revanche y avoir des transferts de public sur certains films, comme nous l’avons remarqué pour Gladiator II où nos résultats sur l’Orium étaient au-dessus de la moyenne. Nous verrons bien pour Avatar. »

En attendant, la fin d’année de Cinéville sera chargée, le nouveau site de Plourin-lès-Morlaix (6 écrans) ouvrant courant décembre pour remplacer le vieillissant Rialto de Morlaix. De plus, le circuit a récemment apposé son enseigne sur l’Olympia de Dijon, officiellement entré dans son giron en avril dernier, tout en conservant « [sa] programmation résolument familiale et grand public ». Enfin, dans la même ville, le Darcy garde son enseigne, et affirme plus fortement sa ligne art et essai avec « environ 90 % des séances consacrées à des films recommandés ». Pour rappel, Cinéville exploite, avec l’ouverture de son site à Beaupréau-en-Mauges, 24 cinémas pour 184 écrans, et a terminé 2024 avec 6,3 millions d’entrées.

* Les salles Orium proposent un écran de 16 mètres de base, un projecteur 4K Pure Laser et un son Dolby Atmos. Les fauteuils électriquement inclinables disposent d’une assise élargie, et d’une tablette en bois ainsi que d’une case de rangement.

© Lilou Hamon

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