Rachat de Warner par Netflix : une levée de boucliers inédite aux États-Unis

Alors que la plus grande acquisition médiatique de l’histoire, évaluée à plus de 82 milliards de dollars, doit être soumise aux approbations réglementaires, l’intégration de Warner Bros dans le dans “N” continue de susciter de vives réactions aux États-Unis de la part des représentants de l’industrie du cinéma, et bien au-delà. 

Les annonces des parties concernées, à commencer par celles du co-PDG de Netflix Ted Sarandos en ce qui concerne la poursuite des engagements de Warner Bros. en matière de sortie salle, n’ont pas suffi à rassurer. Si les réticences de l’Europe, comme celle des professionnels de l’exploitation représentés par l’Unic, semblent des plus évidentes, les inquiétudes sont également grandes du côté des organisations étasuniennes, bien au-delà des exploitants réunis dans Cinema United, qui a réagi dès le 5 décembre

« Nos studios historiques sont plus que des catalogues de contenus : dans leurs coffres se trouvent le caractère et la culture de notre nation », a ainsi déclaré la Producers Guild of America. Elle estime que l’industrie doit être accompagnée par les décideurs publics pour trouver « une voie qui protège les moyens de subsistance des producteurs et une véritable distribution en salles », de manière, entre autres, à « donner aux consommateurs un réel choix et défendre la liberté d’expression ». 

Pour la Writers Guild of America, dont on se souvient de la puissante grève de 2023, cette fusion entraînerait « des suppressions d’emplois, une baisse des salaires, une dégradation des conditions de travail pour l’ensemble de la filière, une hausse des prix pour les consommateurs, et une réduction du volume et de la diversité des contenus proposés aux spectateurs ». Assez de signaux d’alarme pour réclamer un blocage du rachat, sachant que « la plus grande plateforme de streaming avalant l’un de ses principaux concurrents, c’est précisément ce que les lois antitrust visent à empêcher ».

Le spectre du monopole

Prenant la parole au nom de la Committee for the First Amendment, organisation de défense de la liberté d’expression qu’elle avait relancée en octobre dernier, Jane Fonda observe « une escalade alarmante de la concentration qui menace l’ensemble de l’industrie du divertissement, le public démocratique qu’elle sert et le Premier Amendement lui-même ». La comédienne a été rejointe par de nombreux sénateurs américains, de Elizabeth Warren (Démocrate, Massachusetts) qui voit dans cet accord « un cauchemar en matière de lutte contre les monopoles », à Roger Marshall (Républicain, Kansas) qui souligne le « problème anticoncurrentiel horizontal évident » posé par la fusion de deux des plus grands acteurs du streaming. Jason Kilar, l’ancien PDG de WarnerMedia et cofondateur de Hulu, confirme de son côté, sur X : « Si l’on me demandait de le faire, je ne pourrais imaginer moyen plus efficace de réduire la concurrence à Hollywood que de vendre WBD à Netflix. »

Un point de blocage potentiel que la plateforme pourrait contourner en cédant l’activité HBO Max, qui pourrait fort intéresser les candidats pour l’heure éconduits Paramount et Comcast/NBCUniversal… 

En attendant, hier 7 décembre, sur le tapis rouge du John F. Kennedy Center for the Performing Arts de Washington, Donald Trump a lui aussi pointé le « problème » posé par la part de marché excessive que représenterait la fusion Netflix/Warner, et le rôle décisif qu’il sera amené à jouer aux côtés des régulateurs et en tant que président dans son autorisation… ou non.

Les News